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Audiodescription

PROBLEMATIQUE : Comment mettre à égalité de perception et d’intérêt pour nos contenus les personnes malvoyantes, des personnes non-voyantes et les autres participants lors de nos balades par le biais de l’audiodescription ?

Le terme audio-description est emprunté au cinéma au et théâtre (qui a aussi ses souffleurs d’images !). Il consiste, en utilisant les vides sonores disponibles, à décrire les éléments de scénographie et d’intrigue qui peuvent échapper aux spectateurs déficients visuels et ceci de façon qu’ils puissent suivre le film ou la pièce en l’écoutant. Le terme d’audiodescription s’est généralisé peu à peu et concerne aussi les spectacles de danse, les expositions ou plus généralement les expressions artistiques faisant appel au visuel.

Bien que nous ne soyons pas sur le terrain de la création artistique nous reprensons ce mot pour deux raisons :

  • Même s’il y a l’idée d’oralité lorsqu’on parle de description, le mot audiodescription est consacré par l’usage dans son sens de description qui doit « parler » à des gens qui en voient pas ou qui voient mal.
  • Il n’y a guère d’autre voie sinon le terme audiovision, moins redondant et qui dit mieux l’ambition de produire des images avec des mots ; terme que l’AVH a déposé comme nom de marque pour son activité d’audiodescription de films et autres spectacles.

ELEMENTS DE CONTEXTE :

La difficulté réside dans le fait que les déficiences visuelles sont très variables d’un individu à l’autre (Fiche_Déficience visuelle) et que les aides et supports qui vont convenir aux uns : documents agrandis et contrastés ou loupe monoculaire par exemple, ne seront d’aucun secours pour les autres. La pratique la plus universelle, plus encore peut-être que celle du toucher, est de dépeindre avec des mots en utilisant tous les ressorts du discours : les parallèles, des métaphores, des métonymies (principe de la partie qui « parle » pour le tout), les contenus sur lesquels vous avez prévu d’attirer l’attention.

LES PRECONISATIONS :

  • éviter toute description « spécial malvoyants ».
  • L’audio-description sera faite pour l’ensemble des participants et même si elle aura été poussée très avant à l’intention des malvoyants, elle reste destinée à tout le groupe : richesse du vocabulaire, justesse des comparaisons, pertinence des métonymies. N’espérez pas captiver un malvoyant avec une description qui ne captiverait pas un voyant ! Cette conception de l’audio-description et de l’accessibilité nous préserve d’un défaut régulièrement pointé par les personnes en situation de handicap qui est celui de « bêtification » en quoi se résume bien des tentatives d’adaptation partant d’un principe, quasi inconscient peut-être, que le handicap réduit les capacités de compréhension des individus.   Cela dit, il faut garder présent à l’esprit que certains malvoyants ont pu être gênés dès leur scolarité et n’ont pas forcement une grande culture de l’architecture, de l’art, de la botanique ou autre - d’autres participants non plus ! La clef de l’audiodescription n’est pas dans un discours savant mais dans une démarche de construction d’une image mentale, d’une structure intellectuelle, d’un schéma d’explication, qui va ouvrir les mêmes portes dans toutes les têtes ; c’est un peu comme un jeu avec des cubes que l’animateur met à disposition : certains les voient tandis que d’autres se les représentent ; mais toutes les têtes jouent au même jeu avec les mêmes cubes. C’est à la recherche de cette expérience partagée que l’animateur doit se lancer et pour laquelle il lui faudra souvent innover. Mais c’est à ce prix que les participants trouveront complicité et matière à échanger.
  • Hiérarchiser l’information : il y a une façon de décrire ce que nous voulons partager qui facilite la représentation ; une sorte d’économie de la description qui fait que l’ordre dans lequel sont dites les choses en accélère la compréhension. Le principe est d’arriver à décrire comme on le ferait finalement pour des auditeurs de radio ou pour quelqu’un qu’on aurait au téléphone : simplifier, styliser, articuler, imager.
  • Quelques principes techniques  : donner des informations d’orientation (Nord, si l’on est en extérieur, centre/périphérie lorsque cela a un sens dans la description urbaine, entrée/sortie, axes d’un édifice, étages si l’on est dans une construction, etc. Lorsque les lignes directrices sont posées, il peut y avoir un côté pratique à décrire selon la progression : premier plan, deuxième plan,..., arrière plan pour un paysage, un vitrail, une scène de rue par exemple ; lorsqu’il n’y a pas de hiérarchisation possible, la solution sera plutôt une lecture un peu à la façon dont on lit un texte : de haut en bas et de gauche à droite pour que l’esprit recompose le tableau ; l’essentiel est d’annoncer la grille de lecture utilisée pour que la reconstitution mentale soit possible.
  • Lexique précis, riche au service de la narration de la ville, de ses paysages, de ses constituants, de ses ambiances. Riche, mais pas nécessairement savant ; ou alors lorsque c’est utile ou savoureux, en « donnant accès » une fois encore car le niveau culturel pourra être très hétérogène dans nos balades en raison de scolarités écourtées ou de participants qui se sont détournés de certains domaines d’intérêt – et cela ne concernera pas toujours ni systématiquement des personnes en situation de handicap ;
  • Comprendre et travailler les ressorts du plaisir de la description
  • Il y a des choses à comprendre du plaisir de l’auditif et de l’ efficacité des descriptions lorsqu’on écoute des diffusions radiophoniques des matchs de foot, des courses automobiles ou de chevaux, ou encore des pièces de théâtre. La parole est en mesure de tout restituer et il faut la travailler en tenant compte de la déficience visuelle bien sur mais en la destinant à tout notre auditoire.

Le critère de réussite : La description est satisfaisante lorsqu’elle captive malvoyants et voyants en leur révélant ce que leur œil n’a pas nécessairement perçu spontanément : des ordonnancements particuliers, des régularités, des détails qui font sens ou sont des échos d’autres réalités qui viennent interférer.

Nous l’avons souvent entendu lors de nos balades : « Vous, voyants, vous ne savez pas voir ! » ; « Vous regardez mais ne voyez pas ! ». Ce dont certains voyants nous ont donné confirmation en nous disant : «  je n’ai jamais aussi bien vu que lorsque j’ai regardé pour décrire à quelqu’un qui ne voyait pas  ».

Il y a là un ressort qui peut être utile à l’animation des balades : demander la description aux participants voyants et au fil des participations, dégager ensemble de qui fait sens dans le paysage, l’édifice ou l’ambiance approchés, ce qui pose question, ce qui fait l’unanimité ou produit de la divergence et arriver collectivement à une grille de lecture partagée qui pourra être enrichie des savoirs et avis de chacun.

Au cours de cette description, les questions des malvoyants pourront ouvrir bien des pistes de compréhension, d’étonnement. Ce jeu de questions/réponses peut s’avérer extrêmement ludique, heuristique et vecteur de compréhension profonde de la ville à la condition qu’il soit piloté et maîtrisé par l’animateur.

  • Tester vos descriptions  :
  • Enfin, nous ne saurons trop recommander de tester les descriptions comme toute chose dans la balade, et si besoin les reformuler et reformuler encore (ou réorganiser) pour devenir parfaitement agréables et universelles.