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Deux visions, une posture

Les questions de vocabulaire ne doivent pas être bloquantes et crisper les relations avec les participants. Le naturel, même s’il n’est pas politiquement ou méthodologiquement absolument correct vaudra toujours mieux que la langue de bois. Néanmoins, il est important de prendre conscience de l’impact des mots et d’opérer des choix cohérents avec les valeurs que nous défendons en tant qu’acteurs de l’EEU. Vocabulaire et représentations sont très liés : changer les mots sera souvent un levier pour changer "nos têtes".

> DEUX CONCEPTIONS DU HANDICAP : personnes handicapées, personnes en situation de handicap

Les premiers parleront plutôt de "personnes handicapées" ; les seconds plutôt de "personnes en situation de handicap". Quant aux personnes concernées, il leur arrive parfois de réclamer qu’on les appelle tout simplement "handicapés" tant ces euphémisations entretiennent un politiquement correct avec lequel rien ne bouge.

En matière de handicap, deux conceptions s’affrontent dans des débats souvent passionnés. Si nous essayons de les restituer de façon tranchée pour mieux percevoir ce qui met en tension la question du handicap, nous aurons les deux points de vue suivants :

  • L’un pour lequel la déficience est l’origine des difficultés qui font du quotidien et de la vie sociale de la personne handicapée un parcours particulier, irréductible à celui d’une vie ordinaire, avec des désavantages qui doivent être pris en compte et compensés. Dans cette conception, les personnes handicapées doivent être protégées et l’Institution est souvent le meilleur moyen de leur offrir l’environnement qui convient. On reproche souvent à ce point de vue d’être infantilisant vis-à-vis des personnes handicapées et de participer à l "insularisation" du monde du handicap.
  • L’autre pour lequel la déficience est une particularité de l’individu qui ne devient un handicap que dans certaines situations. Il n’y a plus alors de handicap ou de personnes handicapées, mais seulement des situations handicapantes : soit que l’environnement a été conçu sans prendre en compte les déficiences, soit que les comportements sociaux ne sont pas les bons à leur contact (exclusion, disqualification, mépris, etc.). Selon ce point de vue, il faut intégrer les personnes en situation de handicap. Sans aller jusqu’à remettre en cause les acquis en termes de compensation, les partisans de l’inclusion prônent une accessibilité (de l’espace public, de l’enseignement, des emplois, des activités de culture et de loisirs, etc.) devant permettre une vie normale. A ces tenants de la "désinstitutionnalisation du handicap" on reproche souvent l’"injonction à la normalité" qui pèse alors sur des individus qui ont pourtant des difficultés plus rudes à résoudre que la moyenne.

NOTRE POSTURE

  • Avoir choisi dans ce travail de parler de personnes handicapées ne signifie pas que nous nous rangions plus volontiers derrière le premier point de vue. Nous avons fait ce choix d’abord parce qu’il reprend les termes de la loi de 2005, qui reste le repère commun à tous en matière d’accessibilité. Ensuite, l’expression "personne en situation de handicap" ne nous satisfait pas davantage puisqu’elle nous laisse arrimés à une perception déficitaire de la personne handicapée dont nous cherchons précisément à nous débarrasser.
  • Il y a du vrai dans ces deux visions et, plutôt que de trancher, il nous importe davantage de trouver pour nos balades une posture qui respecte et dépasse ce double point de vue.