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Se côtoyer davantage pour des réponses plus humaines

L’accessibilité de l’espace public devait être effective partout en 2015. Pourtant, les dérogations de travaux se multiplient et les retards s’accumulent. En parallèle de cette approche techniciste de la question de l’accessibilité, il se pourrait bien que nous ayons besoin d’être tout simplement plus en contact avec les personnes handicapées et que ce côtoiement apporterait spontanément des réponses "humaines" à l’intégration du handicap.

  • Un important arsenal législatif
    Il n’est que d’observer l’importance de l’arsenal législatif mis en place en faveur de l’intégration du handicap au cours du siècle dernier pour prendre conscience de l’état de séparation des personnes handicapées. La carte heuristique regroupant les principales initiatives législatives ou institutionnelles du siècle écoulé montre que les impulsions viennent surtout du niveau mondial (ONU, UNESCO, OMS, etc.) et retombent en cascade jusqu’aux communes en impliquant tous les niveaux intermédiaires (Union européenne, états, régions, département). Cette entreprise d’intégration du handicap a le renfort de nombreux organismes de consultations et de contrôle : on a l’impression d’une "désinsularisation" du handicap (pour reprendre un titre de Charle Gardou) que l’on cherche à obtenir au forceps.
  • Le contexte français
    L’exclusion du handicap est une réalité un peu partout sur la planète mais avec des nuances importantes d’un pays à l’autre. La France a peut-être la palme de l’exclusion des personnes handicapées avec des associations qui se sont démenées pour édifier les établissements devant apporter des réponses aux besoins des personnes handicapées et à leurs proches. Et cela au point qu’en 2005, Julia Kristeva pouvait intituler son introduction aux premiers États Généraux du handicap "Handicap, une idée neuve en France".
    Bien des études et articles en font mention du retard de la France en matière d’intégration du handicap. Les étrangers nous le disent par comparaison avec la situation qu’ils connaissent chez eux et les français qui rentrent de vacances en Belgique, en Italie ou en Espagne, en sont frappés : en France, les personnes handicapées sont encore très peu présentes dans l’espace public, très peu intégrées à la vie culturelle et aux loisirs, sous-représentées dans les entreprises, etc. Il n’est pas exclu que notre philosophie de l’universalisme et de l’égalité nous rende quelque peu réfractaires à la pensée des différences... [1].

Enfin, parler d’intégration ou d’inclusion maintient une hiérarchie entre la société et le handicap, comme s’il s’agissait d’absorber ; comme si le handicap devait être dissout dans la normalité. C’est pourquoi, plutôt que de penser en termes d’intégration du handicap dans nos balades, nous préférons parler d’interaction entre les personnes participant à la balade : l’interaction est plus respectueuse des singularités et elle se manifeste très concrètement par de la relation, des échanges entre les personnes. Par ailleurs, l’intégration est un critère difficile à percevoir ou mesurer dans nos balades tandis que l’interaction est un signe beaucoup plus manifeste et concret de l’intégration qui finit par fonctionner comme une sorte de baromètre de qualité de l’accessibilité produite dans nos balades.

Notes

[1sur le sujet voir Anne Marie DROUIN-HANS Différences, harmonie et exclusions : la solution des utopies, dans SPIRALE - Revue de Recherches en Éducation - 2001 N° 27 (13-24)